Les Exploits d’un jeune Don Juan

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Les Exploits d’un jeune Don Juan (Guillaume Apollinaire, Éd. Elias Gaucher, Paris, 1905)

VI

Aussi doucement que possible, je pénétrai dans l’étroit couloir. J’étais en savates et je m’approchai de la cloison de bois. J’eus bientôt trouvé la place d’où l’on entendait le mieux. Le capucin s’était arrangé pour que seule la personne qui se confessait restât dans l’oratoire, tandis que ceux qui attendaient se tenaient dans la chapelle.

En conséquence, on n’avait pas besoin de parler à voix basse. Et la conversation était très distincte. Je remarquai à la voix qu’un paysan était au confessionnal. La confession devait être commencée depuis longtemps, car le capucin parla ainsi :

Le Confesseur. — Ainsi tu dis que dans les cabinets tu joues toujours avec ton membre. Pourquoi le fais-tu ? Combien de temps, et cela s’est-il reproduit souvent ?

Le Paysan. — En général, deux fois par semaine, mais parfois tous les jours, jusqu’à ce que ça vienne. Je ne peux pas m’en empêcher, ça me fait trop de bien.

Le Confesseur. — Et avec les femmes, ne l’as-tu jamais fait ?

Le Paysan. — Une seule fois avec une vieille.

Le Confesseur. — Raconte-moi cela et ne me cache rien.

Le Paysan. — J’étais une fois avec la vieille Rosalie, dans le grenier à foin. J’ai commencé à bander et j’ai dit « Rosalie, y a-t-il longtemps que tu n’as plus eu d’homme ? » Elle me dit : « Ah salaud ! C’est-y-bien Dieu possible ? Il y a au moins quarante ans. Et je n’en veux plus aucun. J’ai déjà soixante ans d’âge. » Je lui réplique : « Va, Rosalie, je voudrais bien voir, une fois, une femme nue ; déshabille-toi. » Elle dit : « Non, je n’ai pas confiance, le diable pourrait venir. » Alors j’ai dit : « La dernière fois que tu l’as fait il n’est pas venu. » Alors j’ai tiré l’échelle de façon à ce que personne ne puisse monter. J’ai tiré mon membre et le lui ai montré. Elle l’a regardée et m’a dit : « Il est encore plus gros que celui de mon salaud de Jean. » Je lui dis : « Rosalie, maintenant, il faut me faire voir ton con. » Elle n’a rien voulu me montrer, mais je lui ai relevé les jupes par-dessus la tête et je l’ai bien regardée…

Le Confesseur. — Allons, la suite, qu’est-ce qui est arrivé ?

Le Paysan. — Elle avait une grande fente au bas du ventre. C’était violet comme une quetsche tardive et au-dessus, il y avait un buisson de poils gris.

Le Confesseur. — Je ne te demande pas cela ; qu’as-tu fait ?

Le Paysan. — J’ai fourré ma saucisse dans sa fente jusqu’aux couilles qui n’ont pas pu y entrer. Dès que je fus dedans, Rosalie a commencé à remuer son ventre en avant et en arrière et m’a crié : « Prends-moi sous le cul, cochon ! Mets-y les mains et remue-toi comme moi. » Alors nous avons remué tous les deux, si bien que j’ai commencé à avoir chaud, et que la Rosalie s’est tellement trémoussée que, sauf votre respect, elle a déchargé cinq ou six fois. Alors, j’ai déchargé une fois, sauf respect. Alors la Rosalie s’est mise à crier : « Cochon, serre-moi fort, ça vient, ça vient, ! » et c’est venu aussi une nouvelle fois pour moi. Mais on l’a renvoyée parce qu’une fille de l’étable nous avait entendus et avait tout raconté. Et c’est pour cela aussi que je n’ai pas envie de courir après les jeunes garces.

Le Confesseur. — Voilà de beaux péchés mortels. Qu’as-tu encore sur la conscience ?

Le Paysan. — J’ai toujours pensé à la Rosalie. Un jour que j’étais dans la vacherie pendant que les servantes étaient ailleurs, en train de manger, je vois qu’une vache est en chaleur. Je pense : elle a un con pareil à celui de Rosalie. Je sors ma pine et veux l’enfoncer dans la vache. Mais elle ne se tenait pas si tranquille que Rosalie. Mais je l’ai maintenue, je lui ai soulevé la queue. Alors j’ai pu l’enfiler et ça m’a fait beaucoup plus de bien qu’avec Rosalie. Mais elle m’a chié dessus, sauf respect, si bien que mes couilles et mes pantalons en étaient remplis. C’est pourquoi je n’ai plus eu envie de la baiser.

Le Confesseur. — Oui, mais comment en viens-tu à des actes pareils ?

Le Paysan. — Notre berger le fait ainsi avec ses chèvre et notre servante Lucie s’est mise un jour par terre, dans l’étable, avec le grand jars entre les cuisses, parce que ça fait beaucoup de bien au ventre, a-t-elle dit à sa voisine qui l’a aussi essayé.

La suite de la confession était sans intérêt. Je sortis de ma cachette et courus dans la chapelle voir l’aspect du pénitent.

Je fus étonné de reconnaître ce valet idiot qui, près de l’étang, s’était si sottement prêté aux plaisanteries des belles servantes.

Il était le dernier pénitent homme. Ma mère se leva pour aller se confesser. Près d’elle étaient agenouillées ma tante et la piquante Kate. Derrière se tenaient toutes les servantes. Je m’étonnai de ne pas apercevoir ma sœur Berthe. La régisseuse avait été dispensée d’aller à confesse à cause de sa grossesse avancée.

La confession de ma mère était très innocente mais non sans intérêt : - J’ai encore à vous faire une demande, mon père, dit-elle, après avoir énuméré ses péchés quotidiens, mon mari exige de moi, depuis quelque temps, certaines choses. Dans notre nuit de noces, il m’avait mise nue et avait répété cela de temps en temps. Mais maintenant il veut toujours me voir nue et il m’a montré un vieux livre dont l’auteur était un religieux, dans lequel se trouve, entre autres choses, ceci : « Les époux doivent accomplir l’acte charnel complètement nus, de façon à ce que la semence de l’homme se mêle plus intimement à celle de la femme. » J’ai maintenant des scrupules à ce sujet, ils me sont venus à mesure que je vieillissais.

Le Confesseur. — Ce livre a été écrit au Moyen Âge. La mode de porter chemise n’était pas générale. Les personnes de rang élevé seules en portaient. Les petites gens dormaient sans chemise dans le lit conjugal et il existe encore maintenant des campagnes où cet usage a persisté. Nos paysannes, par exemple, dorment presque toutes ainsi, principalement à cause des punaises. L’Église ne voit pas cette pratique d’un bon œil, mais elle ne l’interdit pas expressément.

Ma mère — Je suis maintenant rassurée sur ce point. Mais mon mari me fait aussi toujours prendre certaines positions dont j’ai honte. Dernièrement, il a fallu que je me mettre nue à quatre pattes, et il m’a regardée par derrière. Chaque fois il faut que je me promène nue autour de la chambre, il me donne une canne et commande : En avant, marche ! ou bien : Halte ! ou bien : Par le flanc droit ou gauche, comme à l’exercice.

Le Confesseur. — Cela ne devrait pas avoir lieu ; mais si vous le faites seulement par obéissance, vous ne commettez pas de péché.

Ma mère. — Ah, j’ai encore quelque chose sur le cœur, mais j’ai honte de parler.

Le Confesseur. — Il n’y a pas de péché qui ne puisse être pardonné, ma fille. Soulagez votre conscience.

Ma mère. — Mon mari veut toujours me prendre par derrière et il se conduit d’une telle façon que je manque de m’évanouir de honte. Dernièrement donc, je sens qu’il m’introduit son doigt, couvert de pommade, dans… dans… l’anus. Je veux me relever, il me calme, mais je sens bien qu’il introduit son membre. Cela m’a d’abord fait mal, mais je ne sais pourquoi, au bout d’un moment, cela me fut agréable, et lorsqu’il eut fini, j’eus la même sensation que s’il eût agi par la voie naturelle. (Le reste fut murmuré à voix trop basse pour que je l’entendisse.)

Le Confesseur. — Ceci est un péché. Envoyez-moi votre mari à confesse.

Le reste de la confession n’était pas intéressant. Bientôt ma tante prit place et j’entendis son agréable voix. Elle s’accuse, à ce que je compris, d’avoir souvent manqué la confession. Mais je fus stupéfait lorsqu’elle ajouta tout bas en hésitant qu’elle, qui jusqu’alors n’avait jamais eu de désirs charnels, avait senti des mouvements amoureux en voyant son jeune neveu au bain et qu’elle avait touché son corps avec concupiscence, mais qu’elle avait pu réfréner à temps ces mauvais désirs. Seulement, une fois encore lorsque son neveu dormait, la couverture étant tombée, on voyait ses parties viriles ; elles l’avait longtemps regardé et avait même pris son membre dans la bouche. Elle disait cela avec une grande hésitation. On eût dit que les mots ne pouvaient plus sortir. Je ressentis une émotion extraordinaire.

Le Confesseur. — N’avez-vous jamais péché avec des hommes ou bien ne vous êtes-vous pas polluée toute seule ?

Ma Tante. — Je suis encore vierge, tout au moins d’homme. Je me suis souvent regardée nue dans la glace et avec ma main j’ai pratiqué des attouchements à mes parties pudiques. Une fois… (Elle hésitait.)

Le Confesseur. — Courage, ma fille ! ne cachez rien à votre confesseur.

Ma Tante. — Une fois ma sœur me dit : « Notre bonne use beaucoup de bougies. Assurément elle lit des romans dans son lit et un de ces soirs elle va mettre le feu à la maison. Tu couches près d’elle, prends-y garde. » J’ai agi ainsi, le soir même en voyant de la lumière dans sa chambre. J’avais lassé la porte ouverte et j’entrai chez Kate sans faire le moindre bruit. Elle était assise par terre, le dos à moitié tourné vers moi et elle se penchait vers son lit. Devant elle était une chaise sur laquelle était placé un miroir, à gauche et à droite du miroir brûlaient deux bougies. Kate était en chemise et je vis distinctement dans le miroir qu’elle tenait à deux mains quelque chose de long et blanc qu’elle faisait aller et venir entre ses cuisses largement ouvertes. Elle soupirait profondément et secouait tout son corps. Tout à tout, je l’entendis crier : « Oh, oh, oh ! ça fait du bien ! » Elle penche la tête, ferme les yeux et semble complètement hors d’elle. Alors je remue, elle fait un bond et je vois qu’elle tient une bougie qui était presque complètement cachée. Là-dessus, elle m’explique qu’elle a fait cela en souvenir de son amant qui a dû partir faire son service militaire. Je m’étonnai qu’on pût agir ainsi, mais elle me supplia de ne rien révéler. Je m’en allai, mais ce spectacle m’avait tant frappée que depuis je n’ai pu m’empêcher, mon père, d’essayer la même chose, que depuis, hélas ! j’ai souvent recommencée. Oui je suis tombé plus bas encore, mon père. J’ai souvent enlevé ma chemise et dans diverses positions je me suis procuré, selon son exemple, des plaisirs coupables.

Le confesseur lui recommanda le mariage et lui donna l’absolution.

Le lecteur peut aisément se figurer ce que fut la confession de Kate, d’après les confidences de ma sœur et de ma tante. J’appris, aussi, qu’elle avait de plus en plus envie d’un homme et que son amitié avec Berthe grandissait énormément. Elles couchaient souvent ensemble et il arrivait souvent qu’elles comparaient leurs culs dans le miroir après s’être contemplées naturellement.

Les confessions des servantes étaient toutes simples. Elles s’étaient laissées enfiler par les valets, mais sans raffinement et elles n’avaient jamais laissé d’hommes entrer dans la chambre où elles couchaient ensemble et nues. Mais cela ne leur avait pas réussi pendant les grandes manœuvre. Un régiment avait passé. Les soldats avaient des billets de logement. On en avait mis partout. Aussi toutes les servantes et même une qui était passablement vieille avaient dû se laisser enfiler, même par derrière, ce qui leur semblait, d’ailleurs, un péché mortel. Lorsque le capucin leur demandait si elles ne s’étaient pas branlées seules ou avec une compagne, elles répondaient : « Qui voudrait passer la main dans un con puant ? » Mais elles ne trouvaient pas mal de s’être regardées mutuellement chier ou pisser et d’avoir utilisé pour jouir, des poulets, des pigeons ou des oies.

L’une s’était fait lécher une fois le con par un chien. À la demande si elle s’était fait enfiler par lui, elle répondit : « Je l’aurais fait volontiers, mais il n’était pas assez gros. »

J’ai pris toutes les précautions possibles pour rentrer dans ma chambre sans être vu.

P.-S.

Texte établi par EROS-THANATOS.COM d’après le roman érotique de Guillaume Apollinaire, 
Les Exploits d’un jeune Don Juan, Éd. Elias Gaucher, Paris, 1905.

Source : http://www.eros-thanatos.com/Confessions-sexuelles-et-zoophiles.html