Mendès

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Hérodote relate dans son Enquête au chapitre de l'Euterpe, le culte du bouc par certains égyptiens qu'il nomme les Mendéciens (de la ville de Mendès qui signifie Bouc). Leur dieu, Banebdjedet est dans la mythologie égyptienne, un dieu de la fécondité et de la génération qui était adoré à Tema-el-amdid, l'antique Mendès. On le nomme d'ailleurs « Bélier seigneur de Mendès ». Il a probablement remplacé un ancien bélier à cornes horizontales dont la race s'est éteinte au Moyen Empire car il possédait des cornes semblables. Sa parèdre est la déesse Hatmehyt.

Il s'agissait de l'équivalent du dieu Pan dans la religion grecque. Hérodote mentionne dans son enquête l'accouplement entre une femme et un bouc dans le cadre de ce culte.

« Les Mendésiens, ceux des Égyptiens dont j'ai parlé, ne sacrifient ni chèvres ni boucs. En voici les raisons : ils mettent Pan au nombre des huit dieux, et ils prétendent que ces huit dieux existaient avant les douze dieux. Or les peintres et les sculpteurs représentent le dieu Pan, comme le font les Grecs, avec une tête de chèvre et des jambes de bouc : ce n'est pas qu'ils s'imaginent qu'il ait une pareille figure, ils le croient semblable au reste des dieux ; mais je me ferais une sorte de scrupule de dire pourquoi ils le représentent ainsi. Les Mendésiens ont beaucoup de vénération pour les boucs et les chèvres, et encore plus pour ceux-là que pour celles-ci ; et c'est à cause de ces animaux qu'ils honorent ceux qui en prennent soin. Ils ont surtout en grande vénération un bouc, qu'ils considèrent plus que tous les autres ; quand il vient à mourir, tout le nome Mendésien est en deuil. Le bouc et le dieu Pan s'appellent Mendès en égyptien. Il arriva, pendant que j'étais en Égypte, une chose étonnante dans le nome Mendésien : un bouc eut publiquement commerce avec une femme, et cette aventure parvint à la connaissance de tout le monde. »

La forte odeur du bouc et son rôle de procréateur l'ont rapidement fait assimiler à Satan, ce dernier symbolisant la luxure, parmi d'autres péchés.

Le Bouc est l'un des animaux, avec le taureau auquel on rendait un culte similaire en Egypte, symboles à l'origine du culte du phallus[[1]].

On attribue aux boucs l'attribut de la fécondité, mais aussi de transmettre cette aptitude aux hommes, d'où la pratique d'accouplement d'un bouc et d'une humaine.

"Dans l’intention, sans doute, de détruire le charme pré tendu qui les maintenait dans un état de stérilité, elles s’offraient au bouc sacré, et se livraient à son ardeur brutale.

« Rien de si certain, dit le traducteur d’Hérodote, que l’infâme coutume d’enfermer des femmes avec le bouc de Mendès. La même chose se pratiquait à Chemnis (ville du Delta). Mille auteurs en ont parlé. »

Des vers du poète Pindare, cités par Strabon, un passage de Clément d’Alexandrie, et plusieurs autres écrivains de l’antiquité attestent l’existence de cette pratique religieuse et révoltante.

« Il arriva, pendant que j’étais en Égypte, dit Hérodote, une chose étonnante dans le Nome mendésien : un bouc eut publiquement commerce avec une femme, et cette aventure fut connue de tout le monde. »

Cette union monstrueuse n’avait pas lieu toutes les fois qu’elle était sollicitée ; et ici, l’instinct grossier d’un animal se montrait supérieur à l’esprit humain dégradé par la religion.

« Il ne faut pas s’étonner, fait dire Plutarque à un interlocuteur, si le bouc de Mendès en Égypte, enfermé avec plusieurs belles femmes, ne témoigne aucun désir pour elles, et ne s’enflamme que pour des chèvres. »

Il existe encore à Chemnis quelques traces de cette dégoûtante prostitution. « On y voit, dit Vivant Denon, un édifice enfoui jusqu’au comble. C’est sans doute le temple dédié au dieu Pan, autrefois consacré à la prostitution. On y rencontre aujourd’hui, comme à Métabis, nombre d’almées et de femmes publiques, sinon protégées, au moins reconnues et tolérées par le gouvernement. On m’a assuré que, toutes les semaines, elles se rassemblaient à un jour fixe dans une mosquée près du tombeau du cheikh Haridi, et que, mêlant le sacré au profane, elles y commet taient entre elles toutes sortes de lascivités. »

Les Juifs, dont le législateur s’était attaché à former des institutions toutes contraires à celles des Égyptiens, bien loin d’adorer les boucs, en présentaient chaque année deux devant le tabernacle. L’un était sacrifié au Seigneur ; et l’autre, chargé des imprécations du grand prêtre et des iniquités du peuple, était envoyé dans le désert.

Il n’en était pas ainsi des sectaires samaritains. Le premier verset de leur Pentateuque prouve qu’ils adoraient le bouc comme le créateur de l’univers : « Au commence ment, y est-il dit, le bouc Azima créa le ciel et la terre. »

Ce culte passa dans l’Inde. Dans les monuments des grottes d’Iloura, qui remontent à la plus haute antiquité, on retrouve le culte du bouc, auquel les Indiens donnent le nom de Mendès, qu’il portait en Égypte.

Le bouc fut adoré en Grèce et en Étrurie. Les Romains modifièrent son culte, et diminuèrent de beaucoup ce qu’il avait de brutal. Voici ce qu’à cet égard nous apprend Ovide :

Les Romains, fâchés de voir les Sabines qu’ils avaient enlevées rester stériles, furent invoquer Junon dans la forêt sacrée du mont Esquilin. À peine eurent-ils achevé leurs prières, qu’ils virent la cime des arbres s’agiter, et qu’ils entendirent cet oracle : « Que les femmes d’Italie soient fécondées par un bouc. » C’était prescrire aux Romains les pratiques révoltantes du culte de Mendès. Ils ne parurent pas disposés à obéir à l’oracle. Alors, un devin d’Étrurie l’interpréta et en adoucit la rigueur :

Il est avec le ciel des accommodements.

Il proposa aux femmes stériles de se faire frapper le dos ou le ventre avec des lanières formées de peau de bouc. C’est ce qui se pratiqua dans les fêtes des Lupercales.

Le 13 février, jour destiné à cette solennité, des jeunes gens, nus ou presque nus, parcouraient la ville, armés du couteau dont ils avaient immolé des boucs, et d’un fouet composé de courroies tirées de la peau de ces animaux, en frappaient ceux qu’ils rencontraient. Les femmes, loin de fuir, accouraient au-devant d’eux et offraient leur ventre nu aux coups de ces jeunes fouetteurs, dans l’espoir de devenir fécondes et de produire de beaux enfants.

On voit que, chez les Romains, la cérémonie était différente : le bouc n’y jouait pas, comme à Mendès, le principal rôle, mais il y avait part, et le motif était le même.

Si l’on pouvait donner croyance à ces récits, mêlés de tant de contes ridicules que faisaient nos crédules aïeux sur les assemblées nocturnes appelées sabbat, on serait tenté de croire que le culte du bouc s’est continué longtemps chez les nations modernes. Dans ces assemblées, c’est toujours un bouc qui préside, c’est un bouc qu’on y adore, c’est un bouc qui s’unit aux femmes assistantes. Si l’on pouvait séparer la vérité du chaos de mensonges qui la font méconnaître, la dépouiller des exagérations et du merveilleux dont sont chargées les relations de ces assem blées mystérieuses, on y retrouverait peut-être les pratiques du culte de Mendès ; on fixerait les opinions encore incertaines sur ce point de l’histoire des hommes ; on délivrerait les esprits du scepticisme pénible où ils sont encore sur l’existence des assemblées du sabbat, attestées par tant d’autorités, par tant de procédures juridiques, et si forte ment contestées par tant d’écrivains illustres.

Une bonne histoire des sociétés mystérieuses de toutes les nations dissiperait bien des incertitudes, formerait un faisceau de lumières qui éclairerait l’origine obscure des institutions humaines, leur filiation, et serait plus utile et plus curieuse que le tableau toujours uniforme des désastres causés par l’ambition de quelques souverains."[[2]]